Crash tragique d’un vol en hélicoptère Bell 407 à Kedarnath le 15 juin 2025 : 7 victimes, enquêtes et nouvelles mesures en montagne.
Le 15 juin 2025, vers 5 h 30 heure locale, un vol en hélicoptère Bell 407 exploité par Aryan Aviation a décollé de Kedarnath en direction de Guptkashi, dans l’Uttarakhand. Environ 13 minutes plus tard, l’appareil a percuté un versant boisé proche de Gaurikund, en pleine vallée de Kedar, provoquant un incendie violent. Les sept personnes à bord – un pilote expérimenté et six passagers, dont un jeune enfant – ont perdu la vie immédiatement. Les circonstances sont dramatiques : visibilité quasi nulle, nuages bas, conditions de CFIT (Controlled Flight Into Terrain) suspectées.
Les autorités indiennes ont rapidement suspendu toutes les opérations d’Aryan Aviation et ordonné la mise en place de mesures nouvelles, avec l’intervention de l’AAIB (Aircraft Accident Investigation Bureau) et de la DGCA (Direction générale de l’aviation civile indienne). Les vols sur le trajet Kedarnath–Guptkashi, vitaux pour les pèlerins empruntant la route des Chota Char Dham, ont été interrompus, tout comme les services de TransBharat Aviation. Dès le lendemain, le 16 juin, le gouvernement d’Uttarakhand a pris le relais pour renforcer la surveillance météorologique et le contrôle en temps réel.
Cet accident d’un hélicoptère n’est malheureusement pas isolé : c’est le 5ᵉ incident impliquant un aéronef civil dans la vallée en moins de six semaines. Le contexte géographique – altitude de 3 584 m à Kedarnath, relief abrupt, évolutions météo rapides – impose une technicité élevée que le secteur peine à garantir. Cette tragédie marque un tournant dans l’urgence de professionnaliser le transport par hélicoptère en zone himalayenne.
Le contexte géographique et opérationnel
L’axe Kedarnath–Guptkashi couvre environ 37 km en vol direct, au-dessus de vallées encaissées entre les altitudes de 3 500 et 1 800 m. Grâce au vol en hélicoptère, les temps de trajet sont réduits à une vingtaine de minutes, contre plusieurs heures à pied ou par route sinueuse. En période de Yatra (pèlerinage), de fin mai à octobre, des dizaines d’appareils assurent en continu la liaison, depuis des bases comme Phata, Guptkashi et Sirsi.
Mais ce corridor souffre de limitations techniques majeures. Les cartes d’approche sont souvent imprécises, la couverture radar est partielle, le contrôle aérien rudimentaire. Les flux météo, dominés par les moussons, changent brusquement : nuages bas, rafales et pluies générant un risque élevé de CFIT .
En 2025, cinq incidents sont recensés : entre le 30 avril et le 15 juin, deux crashes (Kedarnath, Gangotri), une pale heurtant une voiture à Badrinath, un atterrissage d’urgence, puis le crash du 15 juin. Aucun grand groupe public ne domine le secteur, les opérateurs privés (Aryan Aviation, TransBharat Aviation, Pawan Hans) exploitant des Bell 407 et AS350, parfois avec des marges limitées pour la maintenance et la formation continue.
Les autorités recommandent pourtant : équipage senior, repérages météo, refus d’opérer en basse visibilité, retour immédiat devant suspicion de danger . Malgré cela, la répétition des incidents laisse penser que les procédures ne sont pas toujours respectées.

Le déroulé précis du crash
L’appareil, immatriculé VT‑BKA, a décollé de Guptkashi à 5 h 10, a rejoint Kedarnath à 5 h 18, puis s’est envolé de nouveau vers 5 h 19. Le crash s’est produit entre 5 h 30 et 5 h 45, dans un secteur boisé nommé Gaurimai Khark ou Gaurikund, à 3 600–3 800 m, dans un silence radar total .
Le mode opératoire est typique d’un CFIT : l’hélicoptère, sans visibilité, aurait percuté la pente alors que l’équipage ne percevait pas le relief en raison des nuages et de la nuit persistante. L’impact a déclenché un incendie, brûlant quasiment complètement l’appareil, rendant difficile l’identification visuelle des victimes .
Le bilan humain est tragique : 7 personnes décédées : le pilote, Capt. (Lt Col Retd) Rajveer Singh Chauhan, âgé de 37 ans, ancien officier de l’armée indienne avec plus de 2 000 heures de vol, et six passagers dont un enfant de 23 mois. Parmi eux, un couple du Maharashtra, leur enfant, un salarié du temple, etc. .
Les équipes NDRF (National Disaster Response Force) et SDRF sont immédiatement intervenues, en coordination avec la police locale, l’UCADA et les autorités de l’État . Le site a été sécurisé avant le transport des corps.
Investigation et riposte réglementaire
Dès le crash, le ministère civil aérien (Ministry of Civil Aviation) a ordonné la suspension immédiate des vols d’Aryan Aviation, ainsi que la suspension des licences de deux pilotes de TransBharat Aviation pour six mois suite à l’exploitation d’appareils en condition météo dangereuse. De plus, toutes les opérations héliportées sur Kedarnath ont été suspendues les 15 et 16 juin .
Un comité réunissant UCADA, DGCA, DG de l’aviation civile et la météo a élaboré un plan d’action :
- Création d’une salle de commande en temps réel pour surveiller les vols.
- Déploiement d’experts météo à Kedarnath, centralisation via l’IMD (India Meteorological Department).
- Vérification minutieuse des appareils avant chaque vol, règles strictes d’acceptation du décollage.
- Revue des SOP, formation et expérience obligatoire en haute altitude pour pilotes.
L’AAIB mène l’enquête technique pour confirmer le CFIT et l’enchainement des événements. Dans un rapport de 2023 déjà, cette instance avait recommandé ces mesures après un crash similaire en octobre 2022 . Leur mise en œuvre sera cruciale.
Enjeux industriels et pistes d’amélioration
Le Δ altitude, le couloir étroit, et la météo imprévisible imposent un niveau de sécurité maximal. Les technologies comme le radar terrain et le TAWS, courantes dans les jets et avions régionaux, sont rarissimes sur hélicoptère léger comme le Bell 407. Leur introduction obligatoire, au moins dans ce corridor, pourrait sauver des vies.
La coordination météo est aussi centrale : un Météo Station automatisée à Kedarnath fournirait des alertes en continu sur brume, vent et précipitations. Couplée à un réseau de capteurs partagés avec chaque exploitant, cela limiterait le CFIT.
Côté humain, l’expérience de l’équipage est essentielle. L’obligation d’un pilote ayant plus de X heures spécifiques en montagne avant d’être certifié sur Char Dham serait un progrès logique. La rotation systématique des opérateurs comme Aryan Aviation vers des compagnies avec meilleurs antécédents (Pawan Hans, joint-ventures public-privé) pourrait également établir un standard.
Financièrement, un vol de trente minutes au départ de Kedarnath coûte environ 80–120 €. La pression concurrentielle pousse à optimiser, parfois au détriment de la maintenance ou des vols météo sécurisés. Une régulation tarifaire minimum couplée à des subventions publiques en haute saison permettrait de garantir la sécurité sans tarifer excessivement le pèlerin.
Le crash du 15 juin à Kedarnath illustre l’urgence de transformer un secteur de vol en hélicoptère exposé à la haute altitude. Les erreurs fatales cumulent : météo imprévisible, flotte limitée techniquement, procédures parfois négligées et pression commerciale.
Les réponses immédiates – suspension des vols, revues réglementaires et renforcement du contrôle – sont indispensables. Mais la prévention à long terme réside dans :
- Systèmes d’alerte météo dédiés en temps réel.
- Normes technologies embarquées obligatoires (TAWS, communication VHF, radar).
- Formation certifiée pour vols haute altitude.
- Gouvernance renforcée avec surveillance en direct par la DGCA.
- Soutien financier pour limiter les vols non sécurisés.
La renaissance de la sécurité dans ce corridor très fréquenté est conditionnée par la transformation structurelle du secteur héliporté. L’investissement aujourd’hui dans la résilience aérienne évitera d’autres pertes humaines en paysage de montagne.
HELICOLAND est le spécialiste de l’hélicoptère