Le Maroc commande 10 hélicoptères H225M Caracal à Airbus pour moderniser ses Forces Royales Air. Livraison prévue en 2028 pour des missions tactiques et spéciales.
Une commande stratégique pour les Forces Royales Air
Le 1er septembre 2025, le Maroc a officialisé une commande de 10 hélicoptères Airbus Helicopters H225M Caracal auprès de la France, marquant une étape décisive dans la modernisation des Forces Royales Air (FRA). Ce contrat, estimé à environ 500 millions d’euros, s’inscrit dans une dynamique de renforcement des capacités militaires marocaines, avec un accent particulier sur le transport tactique et les opérations spéciales. Les premières livraisons sont attendues pour 2028, un calendrier qui permettra de remplacer une flotte vieillissante et d’introduire des capacités inédites dans la région. Cette acquisition, négociée dès décembre 2021 et accélérée lors de la visite d’État du président Emmanuel Macron à Rabat en octobre 2024, traduit la volonté du Maroc de consolider sa position stratégique au Maghreb.
Les H225M Caracal, fabriqués à Marignane (France), sont des hélicoptères biturbines de la classe des 11 tonnes, conçus pour des missions exigeantes. Ils viendront moderniser une flotte composée de 24 Aérospatiale SA.330 Puma, 24 Agusta-Bell AB-205 Huey, 2 Bell 212 Twin Two-Twelve et 10 Boeing Vertol CH-47D Chinook, dont l’âge moyen dépasse 47 ans. Cette commande renforce également la coopération militaire franco-marocaine, avec la création d’un comité d’armement conjoint en 2024.
Les caractéristiques avancées du H225M Caracal
Le H225M Caracal est une évolution de la famille Super Puma/Cougar, optimisée pour des missions militaires complexes. Long de 19,5 mètres (rotor inclus) et haut de 4,97 mètres, il affiche une masse maximale de 11 000 kg et une charge utile de 5 000 kg. Il peut transporter jusqu’à 28 soldats équipés ou 10 civières pour des missions d’évacuation sanitaire. Propulsé par deux turbines Makila 2A1 de Safran Helicopter Engines, il atteint une vitesse maximale de 325 km/h (175 nœuds) et une vitesse de croisière de 285 km/h (154 nœuds). Son rayon d’action de 1 200 km, extensible grâce à une perche de ravitaillement en vol, en fait un outil idéal pour les opérations à longue distance.
L’hélicoptère intègre une avionique modernisée, incluant un pilote automatique 4 axes, un cockpit tout écran et des systèmes de navigation compatibles avec les lunettes de vision nocturne. Sa boule électro-optique Euroflir 410M NG de Safran offre une détection avancée, tandis que son blindage renforcé et ses systèmes d’autoprotection (détection radar et contre-mesures) garantissent une survivabilité accrue en environnement hostile. Ces caractéristiques ont été éprouvées lors d’opérations comme Barkhane au Sahel, où le Caracal a effectué des missions d’infiltration de forces spéciales et de sauvetage au combat.
Une réponse à des besoins opérationnels précis
La commande des H225M Caracal répond à deux objectifs majeurs pour les Forces Royales Air. Premièrement, elle vise à remplacer une flotte obsolète, incapable de répondre aux exigences modernes des opérations spéciales et du transport tactique. Les Puma et Huey, acquis entre 1969 et 1978, souffrent d’une usure importante, notamment après leur utilisation intensive lors de la guerre du Sahara occidental. Deuxièmement, elle dote le Maroc de capacités inédites, notamment pour l’infiltration et l’exfiltration de forces spéciales derrière les lignes ennemies et les missions de recherche et sauvetage au combat (CSAR).
Les H225M permettront au Maroc de surpasser ses voisins régionaux. L’Algérie, par exemple, repose sur des Mil Mi-17 Hip-H russes, conçus pour le transport d’assaut classique sans les capacités avancées du Caracal. La Mauritanie, avec seulement quatre hélicoptères légers, manque de moyens offensifs. Ainsi, dès 2028, les 10 H225M offriront au Maroc une supériorité opérationnelle, renforcée par leur compatibilité avec les Lockheed KC-130H Hercules déjà en service pour le ravitaillement en vol.
Une coopération industrielle et régionale renforcée
Ce contrat ne se limite pas à une acquisition matérielle. Airbus Helicopters envisage d’implanter un centre de maintenance, réparation et révision (MRO) au Maroc, destiné à soutenir les H225M et à servir de plateforme pour l’Afrique de l’Ouest. Cette initiative, discutée lors des négociations de 2024, s’inscrit dans une stratégie de renforcement des liens industriels entre Rabat et Paris. Le centre MRO, potentiellement basé à Tanger ou Casablanca, pourrait également attirer d’autres clients africains, consolidant la position du Maroc comme hub aéronautique régional.
La commande s’ajoute à d’autres acquisitions récentes, comme les 24 hélicoptères d’attaque Boeing AH-64E Apache et les F-16 Block 70/72 Viper, traduisant une volonté de diversification des partenariats. Alors que les États-Unis ont tenté de promouvoir le Sikorsky S-70I Blackhawk, le choix du H225M reflète une préférence pour la technologie européenne et un renforcement des relations avec la France, après des tensions diplomatiques apaisées par la reconnaissance française de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental en 2024.
Le rôle du H225M dans les opérations spéciales
Les H225M Caracal sont particulièrement adaptés aux opérations spéciales, un domaine où le Maroc cherche à se positionner comme leader régional. Leur capacité à opérer de jour comme de nuit, dans des conditions météorologiques difficiles, est renforcée par des équipements comme le système HForce, qui permet l’intégration d’armements balistiques ou guidés via un système électro-optique ou un casque de visée HMSD. Ces capacités ont été démontrées par l’Armée française lors de missions comme l’évacuation de ressortissants au Liban en 2006 ou la tentative de sauvetage d’un otage en Somalie en 2013.
Pour les Forces Royales Air, les H225M permettront des déploiements rapides dans des zones reculées, comme le Sahara, ou des interventions maritimes dans le détroit de Gibraltar. Leur modularité autorise des configurations variées : transport de troupes, évacuation sanitaire ou appui logistique. Avec une capacité d’emport de 28 soldats ou 5 tonnes de fret, ils offrent une flexibilité opérationnelle inégalée dans la région.
Les défis et perspectives de l’intégration
Malgré ses atouts, l’intégration des H225M Caracal pose des défis. Le coût d’exploitation, estimé à environ 15 000 euros par heure de vol, nécessite une planification rigoureuse. La formation des pilotes et des techniciens, qui débutera dès 2026, demandera un investissement significatif. De plus, la maintenance des H225M, plus complexe que celle des Puma, nécessitera une infrastructure adaptée, que le futur centre MRO devrait combler.
À l’horizon 2028, cette acquisition positionnera le Maroc comme le principal opérateur africain du H225M, devant la Tanzanie (deux appareils). Elle s’inscrit dans une stratégie plus large de modernisation, incluant des drones Bayraktar TB2 turcs et des SpyX israéliens, renforçant la polyvalence des Forces Royales Air. Ce choix pourrait également ouvrir la voie à d’autres commandes, certaines sources évoquant une possible extension à 18 appareils, dont 6 pour la Gendarmerie Royale.

Un pas vers une suprématie régionale
L’acquisition des 10 H225M Caracal par le Maroc marque un tournant dans la modernisation des Forces Royales Air. Ces hélicoptères, avec leur polyvalence et leurs technologies avancées, offriront des capacités uniques en transport tactique et opérations spéciales, renforçant la position du Maroc face à ses voisins. En parallèle, le partenariat avec Airbus Helicopters et la perspective d’un centre MRO consolident les ambitions du Royaume comme acteur clé de l’industrie aéronautique en Afrique. Alors que les tensions régionales persistent, notamment autour du Sahara occidental, les H225M doteront le Maroc d’un outil stratégique pour répondre aux défis sécuritaires et humanitaires des années à venir.
HELICOLAND est le spécialiste de l’hélicoptère.