Décryptage technique : taxi volant expliqué, différences avec drone VTOL, performances, usages, challenges et perspectives du secteur eVTOL.
Le taxi volant, ou air taxi, représente une innovation majeure de la mobilité urbaine aérienne. Il combine les caractéristiques des appareils à décollage vertical comme les hélicoptères, avec la vitesse et l’autonomie des avions, grâce à la technologie VTOL et à la propulsion électrique (eVTOL). Ce type d’appareil est conçu pour transporter plusieurs passagers à la demande, sur des trajets courts à moyens, typiquement entre 20 et 100 km. Il est donc intrinsèquement différent des drones VTOL classiques, plus petits, souvent réservés à un usage logistique ou récréatif.
Conçu en particulier pour désengorger les transports terrestres, le taxi volant vise aussi à réduire le temps de trajet – souvent divisé par deux – et les émissions de CO₂. Plusieurs acteurs technologiques, notamment Joby Aviation, Volocopter, Lilium, Archer, Uber Elevate, misent sur ce concept pour offrir des services urbains novateurs.
Cet article s’adresse aux spécialistes du secteur aéronautique, en proposant une analyse technique détaillée du concept d’air taxi, de ses différences avec les drones VTOL, de ses performances, de ses contraintes réglementaires, et de son intégration dans les infrastructures urbaines. Chaque partie s’appuie sur des données précises pour apporter une réelle valeur ajoutée.
Le concept d’un taxi volant eVTOL
Un taxi volant est un aéronef à décollage et atterrissage vertical (VTOL), généralement électrique (eVTOL), conçu pour transporter des passagers. À la différence d’un drone VTOL classique, qui est souvent un quadricoptère de moins de 50 kg destiné à la surveillance ou à la logistique, le taxi volant est certifié pour des vols habités, transportant plusieurs personnes (souvent 2 à 5).
Techniquement, il combine :
- rotors multicellulaires pour le décollage vertical,
- des ailes fixes pour la phase de croisière, augmentant l’efficacité énergétique,
- une propulsion électrique issue de batteries lithium‑ion ou systèmes hybrides.
Par exemple, le prototype Joby Aviation présente une vitesse de croisière d’environ 320 km/h, une autonomie de près de 160 km, et une capacité de 4 passagers avec pilote . Le Volocopter VoloCity, lui, offre une portée de 35 km pour 2 passagers, avec une vitesse de croisière aux alentours de 100 km/h .
Un taxi volant se distingue par sa certification SC-VTOL (Small Category VTOL) de l’EASA, garantissant la robustesse des systèmes de sécurité et la sûreté des passagers. Cette certification, suivie dès 2021, est un gage que l’appareil répond aux standards applicables à des vols réguliers habités .
Enfin, contrairement aux drones autonomes, la majorité des prototypes actuels incluent un pilote humain, notamment pour satisfaire aux exigences réglementaires FAA/EASA. Certains modèles envisagent un basculement vers l’autonomie, mais l’encadrement actuel demeure avec équipage .
Les différences avec les drones VTOL
Les drones VTOL traditionnels sont généralement des systèmes non habités, conçus pour des charges légères (moins de 150 kg), utilisés pour l’inspection, la cartographie ou la photographie.
Le taxi volant se positionne hors de ce spectre, car il :
- est certifié pour transporter des personnes,
- nécessite des systèmes de sécurité redondants, y compris secours, détecteurs de panne et systèmes OVV (Obstacle Avoidance),
- intègre des éléments supplémentaires tels qu’un cockpit, des interfaces passagers, des systèmes C4ISR,
- repose sur des batteries ou des systèmes Hybrides capables de supporter des masses de plusieurs milliers de kilos (par exemple, VoloRegion pèse environ 1 100 kg et porte 300–400 kg utile) .
En comparaison, un drone tel que l’EHang 216 peut peser environ 900 kg, transporter 2 passagers sur 35 km à 130 km/h, mais sans pilote ni certification eVTOL européenne à ce jour .
L’autre contraste se situe dans l’objectif d’usage : un drone VTOL logistique répond à des missions industrielles ponctuelles. Le taxi volant se destine à la mobilité régulière urbaine, avec interface passager, planification de vols, intégration tarifaire.
Enfin, la dimension infrastructurelle diffère : un drone VTOL peut décoller depuis un simple champ. Le taxi volant requiert des vertiports aménagés pour gérer chargement, changement de batteries, sécurité des usagers, souvent au cœur des zones denses .

Performances techniques et contraintes
Autonomie et vitesse
Les taxis volants privilégient la vitesse et le confort. Les modèles actuels visent entre 100 et 320 km/h en croisière, couvrant de 35 à 160 km par mission. Par exemple :
- Volocopter VoloCity : vol stationnaire + croisière à 100 km/h, portée 35 km .
- Joby Aviation : vitesse jusqu’à 320 km/h, autonomie 160 km, soit 100 miles .
- EHang 216 S : vitesse de 130 km/h, distance maximale de 35 km .
Capacité
La majorité des projets misent sur des configurations pour 2 à 5 passagers. Le VoloCity peut accueillir 2 personnes, tandis que le VoloRegion et certains modèles Lilium montent jusqu’à 4 passagers + pilote .
Energie
La motorisation est électrique, alimentée par plusieurs packs batterie lithium‑ion. Un taxi volant pèse entre 700 kg et 1 200 kg, dont 30 à 40 % de batteries. Le challenge énergétique est majeur, car le décollage VTOL mobilise jusqu’à 3 fois plus d’énergie que la phase de croisière .
Sécurité et redondance
La certification impose une architecture redondante : multiples moteurs/rotors, système de secours, détection d’avarie. L’EASA exige une fiabilité de 10⁻⁹, équivalente à l’aviation commerciale.
Infrastructure
Un réseau de vertiports est essentiel. Ces plateformes doivent offrir :
- zones de décollage/atterrissage,
- capacité de recharge rapide (souvent < 30 minutes),
- connexions au réseau urbain.
Des projets pilotes existent à Paris (barge Austerlitz), Bicester, Coventry, Dubaï.
La réglementation et le cadre opérationnel
Aux États‑Unis, la FAA a créé en juillet 2023 un plan pour intégrer les aéronefs de type powered‑lift (catégorie VTOL) dans l’espace aérien national. Le programme Innovate28 vise à lancer environ un site opérationnel d’ici 2028.
En Europe, l’EASA a publié dès 2019 des normes SC-VTOL, imposant un niveau de sécurité semblable à celui des avions commerciaux.
Au Royaume‑Uni, un plan de déploiement des taxis volants d’ici 2028 est financé à hauteur de 20 millions de livres (≈ 23 M€), avec tests déjà en cours sur les modèles VX4, Joby, Vertical Aerospace.
En France, l’expérimentation menée en juin 2024 à Paris a autorisé les vols de Volocopter, avec pilote passager, autour des JO et installations temporaires en barge et héliport.
Les perspectives et usages
Les taxis volants visent prioritairement à :
- aller‑retour entre aéroports et villes (ex. Joby entre JFK et Manhattan 2025),
- navettes interurbaines rapides, réduisant un trajet de 1 h 30 à 30 minutes,
- transports sanitaires urgents vers grands hôpitaux,
- mobilité VIP et corporate en zone urbaine dense.
Le marché mondial est estimé à 2,5 milliards USD pour les vols aéroportuaires quotidiens (~ 82 000 passagers), avec une croissance liée aux infrastructures vertiportuaires.
Selon IDTechEx, les revenus des taxis volants pourraient atteindre plusieurs dizaines de milliards d’ici 2040, une fois les coûts d’exploitation optimisés. Ces coûts pourraient devenir comparables à ceux d’un taxi haut de gamme, notamment pour des distances supérieures à 30 minutes en voiture .
Le taxi volant est un projet techniquement réaliste, étayé par des prototypes robustes et des certifications en cours aux États‑Unis et en Europe. Ses avantages résident dans la rapidité et la flexibilité, tout en respectant les impératifs de sécurité et d’environnement. En revanche, plusieurs défis doivent être relevés :
- optimisation des batteries et réduction du coût du kW·h,
- développement dense de vertiports,
- acceptation sociétale du bruit, du trafic aérien urbain,
- maintien de standards élevés de sécurité certifiée.
La stratégie actuelle des développeurs consiste à démarrer avec des vols pilotes habités, assistés, avant de viser l’autonomie totale. Le potentiel du secteur réside dans une mobilité disruptive, mais le succès dépendra de l’intégration harmonieuse entre technique, régulation et usages urbains.
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